• La Librairie de Monsieur Charlie - Chapitre 4

    La Librairie de Monsieur Charlie - Chapitre 4

     

       Plusieurs semaines de cours étaient passées depuis la visite de sa grand-mère. Les vacances de la Toussaint approchaient à grands pas et les jours devenaient de plus en plus frais.

     

       La mère de Jonathan n'avait toujours pas trouvé de travail et le garçon s'en voulait de penser cela, mais il appréciait un peu la situation. Anna était toujours à la maison lorsqu'il rentrait des cours, ils parlaient beaucoup plus tous les deux, elle n'était plus fatiguée et Jonathan pouvait profiter d'elle pleinement – sauf quand la sorcière qui lui sert de grand-mère passait à la maison. Mais il savait que cette situation n'allait pas toujours durer et qu'il fallait que sa mère trouve quelque chose. La voiture, quant à elle, refusait toujours de fonctionner correctement. Anna savait qu'elle n'avait pas le choix, elle devait aller au garage pour la faire réparer... Mais pas avant d'avoir un nouvel emploi. Donc, pour le moment, la petite famille faisait sans véhicule. Jonathan s'en fichait un peu, mais il regretta la bonne vieille voiture de sa mère lorsqu'ils partirent faire les courses... et qu'ils étaient tous les deux en train de rentrer à la maison avec les sacs chargés.

     

       À part cela, la vie de Jonathan se déroulait toujours de la même manière. Il allait en cours tous les jours, bien entendu Mathéo trouvait toujours quelque chose pour lui pourrir la vie, et le collégien avait de plus en plus de mal à suivre les cours. Ses notes chutaient lentement, ce qui inquiétait sa mère. Cette dernière s'inquiéta d'ailleurs encore plus lorsqu'elle reçut une lettre l'informant que son fils avait reçu une heure de colle pour travail non rendu, et ce à plusieurs reprises. Elle avait questionné son fils, mais le garçon ne voulait pas parler des problèmes qu'il avait au collège, il estimait que sa mère avait déjà assez de soucis comme ça, pas la peine d'en rajouter !

     

       Nous étions maintenant jeudi soir, Jonathan venait de finir les cours. Encore une journée, et ce dernier était en vacances. Il traversa comme à son habitude la foule d'élèves devant le collège pour quitter la rue et prendre son chemin habituel jusqu'à la maison. Ce jour-là, il put faire un arrêt à la boulangerie, sa mère lui avait donné un peu d'argent pour le remercier de son aide à la maison. Il prit deux éclairs au chocolat – un pour lui et un pour sa mère. En passant la porte de la boutique, il remarqua au sol, juste devant lui, une petite plume blanche. Il n'y prêta pas plus attention que cela et reprit sa route. Il laissa comme à son habitude son regard traînait de gauche à droite, mais ce jour-là, son regard fut attiré vers une petite boutique. Sa devanture était en bois, abîmée à certains endroits. Elle devrait être assez vieille. Jonathan comprit rapidement qu'il s'agissait d'une librairie en regardant la vitrine qui exposait toutes sortes de livres : neufs, d'occasions, anciens, manuels scolaires... mais le garçon fut troublé. Il passait ici pratiquement tous les jours depuis son entrée au collège, et il est sûr de n'avoir jamais vu cette boutique. Il s'approcha de la porte, les sourcils froncés. Elle était en bois également et avait une petite fenêtre sur laquelle un petit écriteau était accroché. On pouvait y lire « La Librairie de Monsieur Charlie » et « Ouvert » d'une écriture dorée.

     

       Curieux, Jonathan poussa la porte. Le bruit d'une petite clochette signala son arrivée. Une odeur de vieux livres envahit ses narines. Les murs étaient habillés d'une vieille tapisserie à motifs floraux bleu-vert et le sol était un beau paquet foncé. Face à la porte se trouvait un petit comptoir sur lequel se trouvait un chapeau melon marron, quelques livres en désordre ainsi qu'une petite clochette pour appeler le libraire. Au fond, il y avait une porte en bois indiquant « Réservé au libraire » et à sa droite, un imperméable beige accroché à un porte-manteau. Sur la droite du comptoir, un petit salon avait été aménagée : de vieux canapés et fauteuils dépareillés – rouge, vert, bleu foncé – étaient installés autour d'une petite table basse ronde en bois, elle-même posée sur un tapis marron qui semblait doux et moelleux. Sur la gauche, il y avait un petit présentoir avec un panneau indiquant « Nouveautés » et des étagères étaient accrochées aux murs et d'autres formaient de longs rayons sur la droite du présentoir. Jonathan attendit quelques instants, mais le libraire ne vint pas. Il s'avança un peu, mais n'osa pas faire sonner la petite clochette sur le comptoir. Après tout, il n'avait rien à demander, il était juste entré par curiosité. Il s'avança vers le présentoir et effleura les livres. Ces derniers étaient rangés négligemment. Jonathan n'avait jamais pris le temps de lire des livres. Sa mère ne lui en achetait jamais. D'ailleurs, en y pensant, il réalisa que sa mère n'en achetait même pas pour elle. Elle n'avait pas le temps de s'installer et de lire tranquillement. Elle courait toujours à droite et à gauche pour travailler et s'occuper de la maison. Et Jonathan faisait ce qu'il pouvait pour l'aider... Soudain, toujours en regardant et touchant parfois un livre, il réalisa que ces derniers n'étaient pas vraiment des nouveautés. Ils étaient plutôt anciens... Le garçon fronça de nouveau les sourcils. Mince alors, c'est quoi ça ? Il prit l'un d'eux et fit tourner les pages rapidement. Il avait l'odeur d'un vieux livre – ce qui expliquait la senteur de la boutique. Une erreur ? La boutique venait peut-être d'ouvrir, le libraire devait sûrement faire du rangement pour le moment... Il haussa les épaules et reposa le livre. Il se dirigeait maintenant vers les rayons. Il sentit de nouveau une odeur, pas celle des vieux livres, mais plutôt... la même que celle qu'il avait senti dans sa chambre. Mais pas moyen de l'identifier ! Il secoua la tête et se concentra plutôt sur la visite de la librairie. Les bouquins qui se trouvaient dans les étagères étaient rangées en fonction de leurs genres, puis par ordre alphabétique. Jonathan observait les livres lorsqu'il croisa deux yeux bleus à travers une étagère. Son cœur fit un bond et il poussa un petit cri.

    « — Oh, excuse-moi ! » s'écria une voix plutôt grave.

    Jonathan avait une main sur sa poitrine. Il entendit des bruits de pas et un vieil homme apparut sur sa droite, au bout du rayon.

    « — Désolé de t'avoir fait peur, je ne t'ai pas entendu arriver. » dit l'homme avec un sourire.

    L'homme avait l'air plutôt vieux, environ la soixantaine, assez grand et plutôt rondouillet. Il avait des cheveux assez courts complètement blanc, une barbe bien fournie et de petites lunettes rondes argentés qu'il portait sur le bout du nez. Il était vêtu d'une chemise à carreaux dans les tons bleus, d'un gilet bleu foncé assez long, d'un chino beige et de mocassins d'un bleu similaire à son gilet. Jonathan avait toujours sa main placée sur le cœur et n'avait pas encore décroché un mot. Les deux hommes s'observèrent un peu en silence.

    « — Tu veux t'asseoir un peu, mon garçon ? demanda le vieillard, tu as l'air sous le choc ? »

    Jonathan secoua la tête et reprit ses esprits. Il devait avouer qu'il avait vraiment eu la peur de sa vie !

    « — Non, non, ça va aller. » finit par dire le garçon.

    Ils se sourirent. Puis le vieil homme s'avança vers Jonathan.

    « — Tu veux de l'aide ? Tu cherches quelque chose en particulier ? »

    L'homme semblait déjà chercher un livre dans les étagères.

    « — Oh, non, je suis juste entré par curiosité. Vous venez d'ouvrir votre boutique ? »

    Jonathan fut étonné de lui-même. Habituellement, il avait du mal à s'adresser aux inconnus. Mais là... Étrangement, il se sentait à l'aise... Il se sentait bien, ici... L'homme se retourna vers lui, il avait l'air de réfléchir.

    « — Oh, ça fait quelque temps... il marqua une pause, mais je suis content que tu sois là, je t'attendais.

       — Vous m'attendiez ? s'étonna le collégien.

       — Enfin, je veux dire, j'attendais des clients... l'homme lui sourit de nouveau, excuse-moi, je ne me suis même pas présenté ! il tendit sa main vers Jonathan, je suis Monsieur Charlie, bienvenue dans ma librairie. »

    Jonathan serra la main de l'homme. Il ressentit une chaleur et un bien-être en la touchant. Il n'eut pas de mal à comprendre que ce Monsieur Charlie était une très bonne personne. Il dégageait une aura de bienveillance... Enfin, Jonathan ne comprit pas vraiment, mais c'est ce qu'il ressentait au fond de lui. Il se sentait étrangement bien dans cette librairie et en compagnie de cet homme. Il ne regrettait pas d'être entré ! Par contre, il regretta de ne pas avoir de quoi s'acheter un livre sur lui... Il ne pouvait pas en acheter un avec la monnaie qui lui restait.

    « — Oh, aussi, cet endroit n'est pas vraiment une librairie. C'est une bibliothèque. C'est juste que « libraire » rime avec Charlie, donc... » l'homme eut un petit rire.

       — Ah d'accord. »

    Le garçon acquiesça tout en regardant autour de lui. Il eut l'impression que le libraire lisait dans ses pensées.

     

       Jonathan venait de trouver son nouvel endroit favori.

     

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    Yumi M. ©

     


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